Analogique et Numérique
Le "numérique" a le vent en poupe. Depuis la sortie des premiers "CD" dans les années 80 les applications du numérique n'ont cessé d'augmenter.
Mais que signifient exactement les termes "analogique" et "numérique" ? 

Au départ était (est toujours et sera toujours) l'analogique :

Les vibrations issues des instruments de musique se propagent dans l'air. Plus les musiciens jouent fort, plus ces vibrations sont intenses. 

L'air, à sont tour, fait vibrer la membrane du micro proportionnellement à l'intensité des vibrations.

Le micro transforme ces vibrations mécaniques en vibrations électriques toujours de façon proportionnelle et continue

 
Si l'on désire enregistrer l'orchestre, le signal issu du micro est amplifié linéairement et envoyé sur la tête d'enregistrement.
Celle-ci produit un champ magnétique - proportionnel au signal électrique - qui va polariser les minuscules grains d'oxyde de fer de la bande magnétique qui défile devant elle. 
Principe très simplifié du "numérique" :

Le "numérique" repose sur le système binaire dans lequel ne peut exister que 2 valeurs 0 et 1.
Ce choix du système binaire s'explique par la facilité à reproduire électriquement ces deux valeurs : 0: absence de tension (0V), 1 : présence d'une tension (5 V par exemple).

On compte en binaire de la même façon que l'on compte en décimal sauf que l'on n'utilise que le 0 et le 1. Ainsi : 


 


10 
11 
100 
101 
110 
111
 
= 0
= 1
= 2
= 3
= 4
= 5
= 6
= 7 
etc..... 
 
Chaque "chiffre" d'un nombre binaire s'appelle un BIT (Binary dIgiT). Le nombre décimal 9 s'écrira, en binaire, avec quatre bits : 1001. Les bits sont souvent regroupés par 8 et forment ainsi un octet (byte en anglais). La valeur la plus élevée que peut prendre un octet est 11111111 qui vaut 255.

La conversion d'un signal analogique en un signal numérique est souvent confiée à des circuits spécialisés fort justement baptisés "convertisseur analogique digitale (CAD)" ou ADC en anglais (Analog Digital Converter).
Le schéma ci-dessous illustre le principe de cette conversion :


La première étape est l'échantillonnage. A des intervalles de temps définis par l'horloge on mesure la tension présente à l'entrée du circuit. C'est à dire que pendant un bref instant on prend "une photo" de la valeur du signal d'entrée qui, lui, continue de varier linéairement. Tout se passe donc comme si l'échantillonnage découpait le signal d'entrée en "tranches".
Cette étape d'échantillonnage peut se faire pendant le front montant de l'horloge et son palier supérieur.

La seconde étape va consister à digitaliser l'échantillon. Le digitaliseur va convertir la tension présente à son entrée en un mot binaire sur 4, 8, 10, 16 ... bits suivant la qualité désirée.
Dans l'exemple précédant le mot sera de 8 bits (1 octet) et aura pour fourchette de valeurs : 00000000 (0) à 11111111 (255). Il faut bien sûr que le signal d'entrée soit "adapté" au digitaliseur. C'est à dire que par des réglages annexes on calibre la valeur maximale du signal d'entrée pour avoir en sortie 11111111. On peut décider, par exemple, que la valeur 11111111 sera atteinte par un signal d'entrée de 2V. Il faudra donc veiller à ce que le signal d'entrée ne dépasse jamais 2V sous peine d'obtenir une conversion erronée.

A ce stade on peut faire deux remarques :

  • Alors que le signal d'entrée analogique pouvait prendre un nombre de valeurs infini entre 0 et 2V (par exemple 1V ou 1.01V ou 1.2568974V...), le mot binaire de sortie n'en contiendra que 256 (0 représentant 0V et 255 représentant 2V)

  •  
  • L'information utile a changé de nature. Dans le signal analogique d'entrée cette information était contenue dans l'amplitude et la fréquence du signal électrique. Dans le mot binaire de sortie l'information est un nombre complètement indépendant de valeurs électriques. On peut décider que le "0" sera défini pour une valeur électrique de 0V et le "1" par une valeur de 5V. On peut aussi décider que le "0" le sera pour une valeur de -12V et le "1" pour une valeur de +12V.

  • Plus intéressant encore, on peut décider que le "0" sera défini pour une valeur comprise entre 0 et 2V et le "1" pour une valeur de 3 à 5V.
La troisième étape, facultative, consiste à sérialiser les mots binaires. 4, 8, 10 ou 16 fils, ce n'est pas toujours facile à manipuler. Il est parfois préférable d'envoyer les bits "à la queue leu leu" sur un seul fil. On peut remarquer que la fréquence d'envoi des bits sur ce fil unique sera 8 fois plus grande que la fréquence d'échantillonnage (dans le cas d'un convertisseur 8 bits) : En effet chaque coup d'horloge génère un mot de 8 bits sur 8 fils. Il faut donc que pendant ce même intervalle de temps les 8 bits générés par le coup d'horloge précédant aient été envoyé sur le fil unique de sortie.

La figure ci-dessous illustre le processus inverse permettant, à partir d'un train binaire, de retrouver le signal analogique.


 

Quelques ordres de grandeur :

Les composantes Rouge, Verte et bleue d'un signal vidéo sont numérisées chacune sur 8 bits (diffusion) ou 10 bits (en production). En diffusion on obtient donc 256 niveaux de rouge, de vert et de bleu soit un total de 16777216 couleurs (256*256*256)

L'oreille étant particulièrement exigeante, le signal audio est numérisé sur 16 bits ce qui permet d'obtenir une résolution de 65536 niveaux.

La fréquence d'échantillonnage doit être supérieure au double de la fréquence analogique la plus élevée. Pour l'audio, les très bonnes oreilles peuvent entendre un son jusqu'à 20000 Hz. La fréquence d'échantillonnage devra être supérieure à 40000 Hz. La norme a retenu 44100 Hz pour le CD audio. Le DAT échantillonne à 48000 Hz. Le signal nicam étant limité à la transmission d'une fréquence maximum de 15 KHz, l'échantillonnage se fera à 32000 Hz. 

Avantages du numérique : 

Si l'on reprend l'exemple précédant de l'enregistrement de l'orchestre, la façon de procéder en numérique donnera quelque chose comme ci-dessous (très simplifié) :

Que se passe-t-il lors de la lecture ?
La bande défile devant la tête. Les micro particules aimantées provoquent une variation de champ magnétique très faible dans la tête qui génère ainsi une très faible tension. Il suffit ensuite d'amplifier cette tension.
Le problème est que, vu les niveaux très faibles, le signal issu de la tête sera entaché de défauts.

On obtiendra quelque chose comme ceci pour un enregistrement / lecture purement analogique (assez exagéré) :

En "1" le signal d'origine

En "2" le signal issu de la lecture

On peut dire sans trop se tromper que les carottes sont cuites. Les défauts (bruit, distorsion..) sont "incrustés" dans le signal et il n'est plus possible de les éliminer.

Pour un enregistrement / lecture numérique on aura ceci (toujours exagéré) :

En "1" le signal numérique d'origine.
En "2" le signal issu de la lecture.

Comme en analogique ce signal "2" est fortement dégradé, mais là on peut faire quelque chose. Comme déjà dit, en numérique ce n'est plus l'enveloppe du signal elle même qui véhicule l'information utile mais le mot binaire que cette enveloppe représente.
Si (fig. 3) on applique un effet de "trigger" en considérant que tout ce qui est au dessus du trait rouge (A) doit être considéré comme un "1" et tout ce qui est en dessous (B) comme un "0", on récupère les mots binaires de façon presque parfaite. (4)

Dans le cas où l'on désire faire des copies de copies (montages ...) le numérique devient encore plus intéressant car les multiples cycles de copies ne généreront plus de défauts, ou plutôt, ceux ci pourront être éliminés.

Correction d'erreurs :

Si les dégradations du signal numérique sont trop importantes, il peut arriver que l'on ne puisse le régénérer. Le numérique offre toutefois la possibilité d'augmenter la résistance du signal en introduisant dans les trains numériques des codes de correction d'erreurs.

Code Reed-Solomon :

En T.V. numérique, l'un des deux codes utilisé pour augmenter la résistance du signal est le code Reed-Solomon. Exemple de fonctionnement simplifié :

On envoi les 3 octets suivants :

12
7
13
A la réception on obtient :
12
7
15
Le troisième octet (15) est faux, mais rien dans l'état actuel ne permet de le détecter.
On ajoute un quatrième octet contenant la somme des octets précédents.
12
7
15
 
32
Maintenant en faisant l'opération (12+7+15) - 32 = 2 on sait qu'il y a une erreur dont on connaît la valeur, mais on ne peut pas dire où.
Pour cela il faut transmettre une autre information qui sera la somme des octets pondérée par leur rang :
soit 12*1 + 7*2 + 13*3 = 65
12
7
15
 
32
65
Somme des octets utiles reçus : 12+7+15 = 34
Somme pondérée des octets utiles reçus : 12*1 +7*2 +15*3 = 71
calcul de l'erreur : 34 - 32 = 2
calcul du rang : (71-65) / (34 - 32) = 3
On connaît l'erreur et le rang de celle-ci, on peut donc corriger.

Le cas de figure suivant peut aussi se présenter. Cette fois ci, c'est l'un des octets de contrôle qui est entaché d'erreur : 

12
7
13
 
36
65
Dans ce cas la somme pondérée des 3 octets utiles transmis et l'octet représentant cette même somme calculée au départ sont identiques. La probabilité pour que l'erreur se situe sur le premier octet de contrôle est donc la plus forte.
Les codes Reed-Solomon sont adaptés à la correction d'erreurs "en rafale" portant sur des blocs d'octets. Par exemple en T.V. numérique le flux de transport est organisé en paquets de 188 octets. A la diffusion, on rajoute 16 octets de contrôle. Une protection de ce type permet de corriger 8 octets parmi les 204.
 
Conclusion :

Le signal analogique est très sensible à son environnement. Sa dégradation est facile et la correction de cette dégradation difficile voire impossible. Le signal numérique est plus robuste et comporte des systèmes de correction d'erreurs, mais il est aussi plus complexe à mettre en oeuvre et, sans compression, occupe un spectre beaucoup plus important que son équivalent analogique (20 à 40 fois). 

Ces courbes comparent les dégradations subies par des signaux numériques et analogiques lors de la transmission.

En analogique la dégradation est régulière.

En numérique la dégradation est d'abord nulle, puis sur une très courte augmentation de l'affaiblissement la dégradation devient perceptible (mosaïque, gel d'image) pour finalement devenir totale.